Encore un article sur le projet de loi HADOPI me direz-vous... Certes, mais il est désormais temps de passer à l'après-HADOPI. Comme il a été maintes et maintes fois répétées, cette loi sera inapplicable et inappliquée, comme la DADVSI le fut trois ans plus tôt.

Pour autant, comme nos ministres de la Culture tenaient absolument à souligner son caractère pédagogique, cette loi entrera tout de même en vigueur courant 2010, comme si de rien n'était. Car le but n'est pas tant de sanctionner les vilains pirates de la Toile, que surtout de leur faire peur à grands renforts de menaces visant à couper leur connexion Internet.

Voici donc dix bonnes raisons de ne pas, malgré tout, craindre cette fameuse loi HADOPI en 2010. En espérant que cet article aide à dédramatiser et à comprendre sa fantastique inefficacité...

1 - Vous n'avez pas encore reçu le premier email de l'HADOPI

Vous n'avez pas encore reçu d'email d'avertissement de la part de la Haute Autorité ? Alors détendez-vous, vous avez à priori de nombreux mois devant vous avant que vous ne soyez considéré comme un odieux pirate responsable de toute la misère de l'industrie du divertissement. Une chose tout de même : veillez à bien relever le contenu de la boîte email de votre fournisseur d'accès Internet (deux fois par mois devrait amplement suffire) : en effet, c'est forcément sur cette boîte que les avertissements vous seront notifiés. En attendant, vous pouvez télécharger à cœur joie, vous avez de la marge !

2 - Vous n'avez pas encore reçu la lettre recommandée de l'HADOPI

Mais vous avez donc reçu le premier avertissement... Alors de deux choses l'une : soit vous vouez un culte aux talentueux "artistes" de TF1, Vivendi Universal & consorts, soit vous avez la guigne. Autre hypothèse, à méditer : vous n'êtes vraiment pas discret dans votre activité de pirate. Dans ce cas, ça commence tout doucement à sentir le roussi... Mais pas de panique ! Si vous jouez la montre, si vous contestez (il faut toujours contester pour gagner du temps) et si vous changez quelques menues habitudes (en changeant par exemple d'adresse IP ou de FAI), alors vous devriez rapidement passer à travers les mailles du filet.

3 - Les newsgroups et les services de direct download ont le vent en poupe

Compte tenu des technologies qui seront employées par la HADOPI, il est extrêmement peu probable que vous soyez repéré sur des réseaux de Newsgroups ou des sites de direct download. Il est en effet difficile d'imaginer comment une autorité régie par une organisation dépassée à tout point de vue (administrativement, technologiquement, industriellement) parviendra à traquer des internautes sur des réseaux dont le siège se situe à l'étranger. Il existe une bonne dizaine de solutions de téléchargement illégal non maîtrisées par HADOPI. Tous les services de Newsgroups et Direct Download en font parti et échapperont vraisemblablement à la surveillance.

>> Pour en savoir plus sur les Newsgroups, je vous invite à lire cet article :
Les Newsgroups sont-ils totalement "HADOPI ready" ?


4 - Tous les outils de P2P proposent des mises à jour pour crypter les données

La plupart des logiciels clients de P2P (eMule, Vuze ex-Azureus, BitTorrent, µTorrent etc...) ont mis à jour leur services depuis fort longtemps en mettant à disposition de ses utilisateurs un plugin ou de nouvelles options de cryptage des données. Le P2P est décrié, on annonce même (à tort) sa mort certaine. Évidemment, la chute de The Pirate Bay à ajouter à la panique ambiante, accélérant le processus... Pour autant, ils ont su s'adapter aux contraintes qu'elles soient techniques ou législatives. D'ailleurs, des sites comme Mininova ou BitSnoop résistent en proposant plusieurs milliers de torrents de qualité.

5 - Le streaming est piratable à l'aide de nombreux outils

De nombreux services permettent de télécharger une vidéo comme le rappellent cet article de Mashable. StreamGet qui est capable de récupérer les flux vidéo et audio, ou ClipToMP3 capable de récupérer les flux audio seuls pour en faire des listes de MP3 à télécharger sont des outils en ligne efficaces. Un seul conseil : soyez sur les starting-blocks, le matériel uploadé sur Youtube ou Dailymotion ne fait parfois vraiment pas long feu. Au passage, si vous souhaitez rallonger l'espérance de vie de vos vidéos sur la toile, préférez RuTube, sorte de YouTube russe. Les administrateurs de RuTube seront moins regardant sur l'origine de vos fichiers. A toutes fins utiles, voici une liste conséquente de sites de streaming.

6 - Votre clé WiFi est en WPA avec un code contenant 64 caractères

C'est un peu le B. A.-ba de cette nouvelle mouture de la loi HADOPI : ne tendez pas le bâton pour vous faire battre ! Pour être précis il s'agit du fameux "principe de négligence caractérisé" : si votre connexion Internet n'est pas du tout sécurisé alors HADOPI considérera cet état de fait comme une négligence et vous tiendra pour unique responsable de l'utilisation frauduleuse de celle-ci. Vous avez besoin d'une connexion WiFi ? Alors abandonnez votre clé WEP au profit d'une clé WPA et faites en sorte que son mot de passe contienne le maximum de caractères (une soixantaine la rendra inviolable). Ou alors...

7 - Votre WiFi est désactivé mais vous connaissez la clé WEP du voisin

Vous désactivez définitivement votre borne d'accès WiFi (toutes les box du marché le permettent). Et si le WiFi vous manque ou vous est indispensable (consoles de jeux, téléphone mobile, ordinateur portable), alors lancez-vous à l'assaut de la connexion WiFi du voisin ! Naturellement, je vous le déconseille puisque c'est immoral et gravement répréhensible devant la loi. Mais c'est le paradoxe de la loi HADOPI : comme il est relativement compliqué de prouver qu'on s'est fait pirater, il est désormais plus grave aux yeux de la loi de se faire pirater que de pirater. Variante moins risquée, ne téléchargez qu'en dehors de chez vous : dans les Starbucks, les cybercafés, les restos MacDo, les bornes WiFi publiques... Et souvenez-vous bien que tout cela est très mal !

8 - Vous téléchargez des séries et des groupes inconnus en France

Vous téléchargez Nightwish, Sonata Arctica et Lordi ? Vous appréciez des séries comme The Big Bang Theory ou DollHouse ? Cette raison de ne pas craindre la loi HADOPI recoupe la deuxième raison de cette liste : si vous ne téléchargez pas de matériel issu des grandes majors (Universal en tête de gondole) ou produit par TF1, alors il est peu probable que la HADOPI vous repère. Bien que nos ministres de la Culture aient ressassé leur discours propagandiste sur la soi-disante protection des artistes, il est quand même probable que les petites maisons de disque et les labels indépendants (surtout s'ils sont étrangers) n'auront jamais les moyens de faire valoir leurs droits devant une haute autorité comme HADOPI. Mais est-ce grave puisque...

9 - Comme tous les internautes, vous achetez aussi des disques et des films

Si vous êtes un internaute "lambda", alors il y a de très grande chance pour que vous soyez aussi un consommateur tout ce qu'il y a de plus "lambda". Car vous téléchargez et vous achetez. Mieux : comme beaucoup d'internautes, vous téléchargez beaucoup et vous achetez beaucoup ! Ce n'est pas moi qui le dit, ce sont les sondages (et même une enquête commanditée par le ministère de la culture himself). Au regard de vos dépenses consenties dans l'achat de biens culturels, il est plus que probable qu'il sera bien plus facile de contester et obtenir gain de cause si vous êtes un grand consommateur que si vous êtes un pirate exclusif. Mais en tout état de cause, cela semble statistique : les plus gros pirates sont presque toujours les plus gros consommateurs.

10 - Autant de chances d'être attrapé par HADOPI que de gagner au loto

"En passant par un juge, et avec la lenteur de la justice (...), seuls dix mille cas par an seront sanctionnés sur dix-huit millions d'internautes. Autant dire que l'on a autant de chance de gagner au loto que de se faire pincer par Hadopi. De plus, le juge saisi déboutera sûrement l'affaire, faute de preuves suffisantes". Ce n'est pas moi qui le dit mais le député UMP de Haute-Savoie : Lionel Tardy. Or, 10'000 sanctions sur 18'000'000 par an, cela représente d'une part moins de 850 sanctions par mois et d'autre part, moins de 6 chances sur 10000 de se faire attraper.


Si le pirate n'a pas à craindre HADOPI, alors en revanche, Madame Michu, elle, aura d'excellentes raisons de craindre cette loi en 2010. Car non aguerrie aux joies de l'Internet auxquelles elle porte un regard de profane, elle ne sera pas en mesure de déjouer les innombrables et vicieux pièges de la loi : connexion Internet mal sécurisée à la portée de n'importe quels pirates en herbe, ménagère de 45 ans inconditionnelle de tous les programmes de TF1, fiston peu scrupuleux téléchargeant par ci par là le catalogue de Universal... Elle ne le sait pas encore, mais... Oui, la pauvre Madame Michu va prendre pour cher !